Non, «Zelda» ne rend pas accro.
Sorti le 19 mai dernier, The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom est un jeu présenté parfois comme « addictif ». Il me semble important de rappeler que ce glissement lexical du médical vers le langage courant durant les dix dernières années, laisse encore présupposer que jouer à un jeu vidéo ferait courir un risque. Il n’en demeure pas moins que Zelda n’est pas forcément le jeu le plus facile à gérer, surtout pour des enfants.
Il fait directement suite à Breath of the Wild (2017), qui était déjà le jeu de tous les superlatifs. Nintendo a pris le temps d’en parfaire la recette pour proposer un nouveau voyage parfaitement enchanteur et épique. Je le recommande sans l’ombre d’un doute, pour petits et grands explorateurs.
Mais sa plus grande qualité représente également sa plus grande difficulté. Il s’agit d’un « monde ouvert », ce qui implique qu’après y être parachuté (au sens propre comme au figuré), le joueur ou la joueuse peut décider de l’ordre dans lequel organiser sa quête. C’est l’instinct ou l’envie de la personne tenant la manette qui guide la direction à prendre.
Équipé d’une longue vue, Link (personnage que l’on incarne), scrute l’horizon et note ce qui attire son regard. Avant de débloquer progressivement une carte pour s’orienter, on suit une vague direction donnée par un habitant de la région. « Il paraît qu’une grotte au nord renferme un fabuleux trésor ». Cap donc sur le nord ! Mais le long de la route, un groupe de rochers au loin semble curieux. Faisons un léger détour. Léger, qui risque fort de s’éterniser, nous attirant progressivement bien loin de l’objectif initial.
Le grand talent des développeurs est de proposer un monde (comme ils l’avaient fait dans Breath of the Wild, mais auquel est ajoutée l’exploration du ciel et des souterrains) invitant à l’émerveillement et à l’exploration. Lorsque nous repérons un détail qui pique notre curiosité, que nous prenons le temps de nous y rendre et qu’effectivement quelque chose s’y trouve, peu importe qu’il s’agisse d’une grande ou petite découverte, nous nous sentons comme en résonance avec les gens qui ont pensé ces courbes topographiques. L’exploration en devient très agréable et gratifiante.
La pratique de ce jeu nécessite alors une compétence que celui-ci ne nous apprend pas : la gestion des priorités. Seuls un sens affuté des responsabilités (que les enfants n’ont pas encore acquis dans leur développement) ou une aide extérieure (ce dont tout enfant est équipé de série), permettront de se fixer le moment de s’arrêter de jouer. Mon conseil aux parents est de signaler aux enfants lorsque le moment de s’arrêter approche et de fixer ensemble un objectif réaliste : « – Tu cherches quoi là ? – J’aimerais savoir ce qu’il y a au sommet de cette montagne. – OK alors quand t’arrives en haut on passe à table ». Et peut-être rester à leur côté jusque-là pour les aider à le respecter.